La guerre n'a pas un visage de femme (Svetlana Alexievitch) - Extrait
Svetlana Alexievitch, "La guerre n'a pas un visage de femme", page 272 :
(L'auteur donne sa définition de la souffrance et de son importance dans la civilisation russe)
Parfois, je rentre chez moi après une série d'entretiens avec l'idée que la souffrance, c'est la solitude. L'isolement absolu. D'autres fois, il me semble que la souffrance est une forme particulière de connaissance. Une sorte d'information essentielle. Mais pour nous, il y a dans la souffrance quelque chose de religieux, de presque artistique. Nous sommes une civilisation à part. Une civilisation de larmes. Pourtant, là, ce n'est pas seulement l'abject qui se dévoile à nos yeux, mais aussi le sublime. En dépit de tout, l'homme tient tête. Il s'élève. Et garde sa beauté.